Les virements sur son compte ont duré sept années. L’assistante au tribunal de commerce a tout dépensé en voyance. Elle écope de sursis, avec obligation de soins.
lle vit en colocation à Abzac et sa voiture est loin d’être une grosse cylindrée. Aucun signe de richesse, il ne reste rien de ses incessants virements quotidiens qu’elle a réalisé sur son compte personnel, alors qu’elle officiait, en tant qu’assistante, au greffe du tribunal de commerce de Libourne.
En l’espace de sept ans, elle a détourné près de 280 000 euros.
Des comptes du greffe ou de la Caisse des dépôts vers le sien. Tout simplement, en quelques clics. Mercredi après-midi, elle comparaissait devant le tribunal correctionnel de Libourne pour abus de confiance, usage de faux en écriture et altération frauduleuse de la vérité dans un écrit.
À la barre, perdue dans ses pleurs, le petit bout de femme de 43 ans reste coi face aux incompréhensions du dossier, soulignées par le président du tribunal Gérard Denard : « On ne retrouve rien de ces sommes dans l’enquête. Vers qui elles sont allées ? On se demande qui en a profité ? » Il est bien là le problème, et la particularité de cette drôle d’affaire.
Les centaines d’euros dérobées chaque jour, de son bureau, devant les collègues bien incapables de penser à pareille escroquerie, n’ont pas servi à financer des voyages, des grammes de cocaïne ou des biens immobiliers. Ils sont partis sur des sites de voyance « à 90 % » selon le procureur de la République Christophe Augé. De 500 jusqu’à 1000 euros par jour jetés dans des boules de cristal virtuelles et pas franchement divinatoires.
La prévenue a très mal vécu une séparation. Elle a dû déménager, acheter des meubles, refaire sa vie. Elle a surtout souscrit des crédits. « Un, deux, trois puis tous les emprunts possibles », livre son avocate, Me Julie Dykman. Jusqu’à 4500 euros de remboursement par mois alors qu’elle touche un peu plus de 1200 euros mensuels. Alors elle s’est servie sur les comptes de ses employeurs et de la Caisse des dépôts…
Mal dans sa peau, avec un entourage restreint, elle s’enfonce dans son addiction, la voyance pour qu’on « l’écoute. » « Mais vous ne pouviez pas en parler à quelqu’un de proche ? », l’interroge Gérard Denard. « C’est compliqué de dire quand on a des problèmes », répond la prévenue, entre deux tombées de larmes.
Hier, le tribunal a décidé de la condamner à 24 mois de prison avec sursis et mise à l’épreuve durant trois ans, avec l’obligation, notamment, de se soigner. Elle devra en outre rembourser plus de 150 000 euros aux greffiers du tribunal de commerce, la prévention portant sur les années 2010 à 2013, le reste des détournements, sur la période 2006-2010, étant prescrits.
La prévenue a promis de rembourser. Elle qui croule sous les dettes assure vouloir au moins donner quarante ou cinquante euros par mois. Il faudra du temps pour rembourser la somme.
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